Le testament de monsieur Napumoceo da Silva Araújo
Titre original : O testamento do Senhor Napumoceno da Silva Araújo (Cap-Vert, 1989)
Traduit du portugais par Edouard Bailby
Editions Sépia (1995)
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Etant l’un des rares ouvrages à avoir bénéficié d’une traduction en plusieurs langues, ce premier roman de Germano Almeida est sans doute parmi les plus connus de la littérature capverdienne. Mais aussi prometteur qu’il ait pu sembler, sauf erreur, aucune des autres publications qui l’ont suivi ne semble avoir été traduite en français. On se demande un peu pourquoi d’autant qu’ayant été couronné par le prestigieux prix Camões en 2018, il semble bien que les œuvres de cet auteur aient été appréciées par plus d’un lusophone.
Prétexte à portrait, ‘Le testament de Monsieur N…’ s’ouvre donc au moment où réunis chez le notaire, un petit groupe de personnes concernées assistent à la lecture dudit testament. Rédigé dix ans plus tôt (soit en 1974), le document, qui compte 387 pages, s’avère être une sorte d’autobiographie faisant état des principaux événements ayant marqué l’existence de cet homme. Ecrit avec plus ou moins de complaisance et avec plus ou moins de fidélité à la réalité, le fameux ‘testament’ n’en révèle pas moins une personnalité que d’aucuns n’auraient imaginé. C’est ainsi qu’à l’instar de Maria (héritière) nous partons à la découverte d’un homme dont le côté ‘pile’, méconnu et parfois insoupçonné chez ce respectable ‘self-made man’, nous est éventuellement révélé.
Bien que datant d’une trentaine d’années ce roman, publié en 1989, tout en explorant le thème des apparences-qui-sont-souvent-trompeuses, nous ouvre donc une petite, une toute petite fenêtre sur cet archipel, colonie portugaise jusqu’en 1974, sis au large des côtes du Sénégal.
Au fil des neuf chapitres qui le composent, nous croisons donc une galerie de personnages appartenant à divers milieux, tandis qu’au gré de quelques aller retours dans le temps, l’auteur dresse avec humour et empathie un mini portrait de société couvrant, quoique succinctement, les deux premiers tiers du XXe siècle.
Evoluant de façon non linéaire, la narration suit un fil dont la logique m’a semblé tenir plus de l’association d’idées que d’un enchaînement d’événements, du passage du temps, ou encore de l’exploration d’un thème. Ainsi, ce procédé donne lieu à une suite de petites scènes, certes reliées entre elles, mais au long desquelles la direction prise par cette pseudo-intrigue semble incertaine. A cet effet, il m’a semblé qu’un perceptible décalage entre le point de vue adopté (celui du principal protagoniste) et l’élément moteur du récit (la quête de Maria (un personnage secondaire qui, à mon avis, est insuffisamment développé)) aura contribué à faire évoluer le récit d’une manière que l’on peut qualifier ‘d’inhabituelle’.
Près de l’oralité, la prose est simple, fluide et s’accorde plutôt bien avec le style de narration.
Quelques scènes ou manifestations érotiques dont les descriptions m’ont paru assez bien maîtrisées, viennent pimenter le récit (soulignons cependant la présence dans ce roman d’un passage évoquant un viol dont la description et le traitement pourraient choquer certains lecteurs).
Enfin, sans être remarquable, voilà un premier roman plutôt bien conçu, court, facile à lire, mais qui m’a laissé sur ma faim.
Note : soulignons que ce roman a fait l’objet d’une adaptation pour le cinéma, réalisé par Francisco Mans, le film (disponible en VO portugaise) est sorti 1997.
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