Henrik Johan Ibsen

Ibsen

Une maison de poupée

Livre de Poche, 1990.

Traduit du norvégien par Marc Auchet.

Dramaturge norvégien parmi les plus importants du XIXe siècle, Henrik Ibsen est souvent considéré comme l’un des fondateurs du théâtre moderne. Initialement imprégnée de romantisme son œuvre ne connaîtra cependant le succès qu’une fois composée à l’encre du réalisme social, un courant auquel l’auteur souscrit au cours des années 1860 et auquel il sera dès lors généralement associé. Puis, c’est en 1879, alors qu’il est âgé de 51 ans, qu’Ibsen présente ‘Une maison de poupée’, une pièce qui remporte un grand succès et lui vaut la renommée internationale qu’on lui connaît.

Composée de trois actes, la pièce, ayant pour décor le salon d’une famille appartenant à la petite bourgeoisie danoise, se déroule sur trois jours. A la veille de Noël, Nora Helmer rentre chez elle chargée de paquets. Légère, insouciante, dépensière, elle cherche avant tout à faire le bonheur de sa famille. Mais sous ses airs d’enfant gâtée, Nora cache un secret. Huit ans plus tôt, alors que son mari était gravement malade, elle n’a pas hésité à déroger de son statut d’épouse pour contracter, à l’insu de son mari, un prêt qu’elle aurait obtenu moyennant une signature falsifiée. Si les intentions sont louables, les moyens sont d’autant plus répréhensibles qu’elle place le mari, légalement responsable de l’épouse, dans une situation quelque peu délicate . Certes le secret a été bien gardé et la charge bien assumée par Nora, mais par une suite d’événements imprévisibles il risque en cette veille de Noël d’être exposé au grand jour.

Grâce à ce scénario, Ibsen explore le thème du mariage dans la société patriarcale au XIXe siècle. S’intéressant plus particulièrement au rôle des époux ainsi qu’à la relation entretenue par ceux-ci, il montre à travers le couple Helmer comment les dictats sociaux définissent non seulement les valeurs et comportements individuels, mais également la façon dont chacun entre en relation avec l’autre. La pièce aborde également le thème de la condition féminine, de l’éducation et de la place qu’occupent les femmes dans la société de l’époque et touche plus généralement le thème de l’affranchissement de l’individu face aux règles imposées par la société.

Avant-gardiste en son temps, notamment en raison des mises en question qu’elle propose, cette pièce vaudra à l’auteur d’être considéré comme un réformiste ainsi qu’un chef de file parmi ses pairs.

Bien évidemment conçue pour la scène, cette piquante étude de mœurs, en dépit d’une intrigue habilement construite, ne se laisse que fort timidement apprécier à la lecture; intimement attaché au développement thématique, le récit peine à s’épanouir, la prose paraît sèche, tandis que les répliques semblent convenues et débitées par des personnages si stéréotypés qu’on a parfois le sentiment d’avoir affaire à des poupées de carton. Ainsi, la lettre ne rendant pas justice au travail de l’auteur, il donc est préférable dans ce cas-ci de se tourner vers la scène où, une fois jouée par des comédiens aguerris, la pièce prend de l’envergure et déploie toute sa puissance dramatique.

Jouée à travers le monde de même qu’adaptée pour le cinéma à maintes reprises, ‘Une maison de poupée’ demeure un modèle non pas tant pour sa forme mais surtout pour son contenu thématique; un contenu universel qui, marqué par le passage du temps, conserve sa signification en s’inscrivant sur un continuum socio-historique.  Cette œuvre a sans-doute encore de beaux jours devant elle.

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