Train to Pakistan1
Grove Press (1956)
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La partition de l’Inde en 1947 entraîna l’un des épisodes les plus sombres de l’histoire de l’humanité. Des causes et des raisons on peut longuement discuter et vu l’envergure du sujet, je me serais donc attendu à ce qu’un roman s’y attaquant soit à la fois dense, lourd et complexe. Mais constatant comment en moins de deux cent pages, ‘Train to Pakistan’ parvient à dresser un portrait clair et compréhensible de la situation ayant prévalu au nord de l’Inde au cours de cette période, cela m’a paru d’autant plus remarquable qu’il le fait fort habilement. Certes le cadre sociopolitique y est décrit à grands traits et de ce point de vue, l’approche adoptée peut sembler plutôt schématique. Mais cela a pour avantage de nous donner un bon aperçu de circonstances avec lesquelles nous ne sommes pas forcément tous familiers d’une part et d’autre part, cela permet à l’auteur de contourner les tenants et les aboutissants historico-politiques liés à cet épisode pour mieux s’attarder à l’aspect humain.
Composé de quatre parties, le récit commence par un bref exposé de la situation:
“By the summer of 1947, when the creation of the new state of Pakistan was formally announced, then million people – Muslims and Hindus and Sikhs – were in flight. By the time the monsoon broke, almost a million of them were dead, and all of northern India was in arms, in terror, or in hiding.” (p.2)
Après quoi nous rejoignons Mano Majra2, un village fictif situé dans l’état du Pendjab, près de la frontière entre l’Inde et le Pakistan. Relié au reste du monde par les trains passant ou s’arrêtant à la gare situé non loin du village, Mano Majra, si l’on en juge par le peu d’information y circulant au sujet des turbulences ayant cours ailleurs dans le pays, n’en est pas moins isolé.
Essentiellement constituée de paysans et de petits commerçants, pour la plupart illettrés, la population de Mano Majra, exception faite de la famille du prêteur Lala Ram Lal, uniques Hindous du village, se partage sur le plan des croyances religieuses à parts égales entre Musulmans et Sikhs. Puis c’est généralement sous la présence protectrice du dieu du village que Mano Majra mène depuis toujours une existence paisible dans un quotidien synchronisé par le passage des trains faisant l’aller retour entre Delhi et Lahore.
C’est d’abord par un changement affectant les horaires des trains, puis l’arrivée de militaires venus installer un poste de surveillance aux alentours de la gare, que peu à peu la réalité rejoindra ce village frontalier pour éventuellement l’atteindre de plein fouet.
D’abord consternés les villageois sont vite dépassés par les événements. Tandis que le prêtre Sikh et l’Imam se tournent vers la parole sainte et que Hukkum Chand, le magistrat de passage dans les environs, tente de noyer sa conscience dans l’alcool, alors que l’inspecteur de police manœuvre pour masquer l’incompétence de ses effectifs et que Iqbal Singh l’activiste cherche à concilier la situation dans laquelle il se trouve avec son plan de carrière, dans la lointaine Delhi, le nouvel état indépendant et ses opposants semblent pour leur part ne savoir que tergiverser.
A travers ce microcosme de société, adoptant le point de vue de ‘ceux qui sont restés’, ‘Train to Pakistan’ illustre de façon réaliste comment, toutes intentions confondues, le facteur humain, qu’il se soit exprimé par l’hypocrisie, la peur, l’incompétence, l’ignorance, la corruption, la cupidité ou la haine, aura, si ce n’est causé, à tout le moins précipité l’une des plus grandes tragédies de l’histoire.
S’inscrivant sous l’école moderniste des romans tels que ‘Heart of Darkness’ (Au coeur des ténèbres)2, ce roman, publié en 1956, figure parmi les premiers écrits de cet auteur3 dont la carrière littéraire, journalistique et politique fut bien remplie. Maniant le verbe avec précision et efficacité, – les descriptions sont à la fois brèves, visuelles et d’une vraisemblance que l’on ne saurait questionner, la prose est épurée et va à l’essentiel, le récit évolue à bon rythme – Khushwant Singh livre ici un roman captivant.
Notes:
- Titre de l’édition française: Le train pour le Pakistan
- Roman écrit par Joseph Conrad, publié en feuilleton en 1899 et en livre en 1902.
- Soulignons que Khushwant Singh est né en 1915 à Hadali, un ville du Pendjab faisant maintenant partie du Pakistan.
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