Orbitor (T.1)
Traduit du roumain par Alain Paruit
Folio/Denoël (1999)
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Au seuil de la trentaine, Mircea, le narrateur et probable alter ego de l’auteur, souhaitant réaliser son rêve de toujours, s’installe dans une petite mansarde, -un lit une table et une chaise-, où, par le moyen de la pensée et de l’écriture, il compte “…retourner là où personne n’est retourné, de me rappeler ce que personne ne se rappelle, de comprendre ce qu’aucun être humain ne peut comprendre: qui suis-je, que suis-je?” (p.122)
Cela se passe à Bucarest au cours de l’année 1986.
Après avoir exploré quelques moments ou événements ayant marqué son enfance (fin des années 1950 et début des années 1960), Mircea plonge bientôt dans un passé antérieur, évoquant de manière mythique l’histoire de ses ancêtres (fin 19e siècle). Puis il suit la trace de sa mère, jeune fille de la campagne venue à Bucarest pour y gagner sa vie qui, tout en trimant dans un atelier de couture, vit ses premières expériences de jeune adulte avant d’être confrontée aux réalités de la guerre et de finalement rencontrer celui qui devint son mari (années 1950).
Questionnant ainsi la notion de l’origine, de la conception et de la création, Mircea explore le concept de réalité/irréalité, empruntant pour ce faire des voies parallèles qui l’entraînent dans un espace-temps où passé et futur se confondent l’un dans l’autre. Dans cet univers surréel, obsédé par sa matérialité et par la physiologie des corps autant que par celle de l’univers que nous habitons, il pénètre les choses et les êtres, observe leur substance, leur essence et nous les dépeint au gré d’une prose teintée de poésie hallucinée, nous conviant ainsi, à titre de lecteurs-spectateurs, à un véritable festival de mots et d’images.
Bucarest, les papillons, la physiologie des corps, l’être, la matrice, la mère, sont les thèmes/images prédominants dans ce récit au long duquel le narrateur tente de s’approprier le monde et sa propre réalité sous un angle essentiellement sensoriel.
Ovni littéraire, c’est un roman qui ne se laisse pas aisément décrire et que l’on peut difficilement raconter ou catégoriser. S’inscrivant de prime abord dans la forme auto fictive, il prend vite des airs de voyage onirique, servi à la sauce philosophico-surréaliste et parfumé d’un brin de mysticisme. Une quête personnelle donc, un voyage exploratoire dans l’univers de l’être qui éclate sous nos yeux tel un feu d’artifice littéraire. Eblouissant, mais frôlant parfois l’excès.
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