Contes exemplaires
Titre original : Contos Exemplares, Portugal, 1962
Traduit du portugais vers le français par Alice Caffarel et Claire Cayron
Editions La Différence, 1988
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Première femme lauréate du prestigieux Prix Camões (1999), Sophia de Mello Breyner Andresen (1919-2004) est généralement reconnue comme l’une des plus importantes poètes portugaise du XXe siècle. Outre sa poésie elle a également publié des contes pour enfants, des contes pour adultes, des essais, diverses traductions ainsi que quelques pièces de théâtre.
Peu traduits en français, ses recueils de poèmes étant malheureusement devenus rarissimes sur les rayons des libraires, je me suis donc laissé tenter par ce livre de contes dont le titre, au premier coup d’œil, m’a semblé fort engageant.
Composé de six récits1 ce petit ouvrage qui se lit assez rapidement donne sans doute un avant-goût de l’écriture et de l’esprit traversant l’œuvre de cette grande dame de la littérature portugaise.
Sa rangeant tantôt du côté du conte, tantôt du côté de la fable ou du récit de tradition orale, qu’il soit question d’un Homère tout à fait singulier, de rois en quête de vérité, d’un homme que tout abandonne, d’un couple égaré et bien d’autres choses, tandis qu’elles explorent divers thèmes et lignes de réflexion avec finesse et doigté, en dépit des marques laissées par le passage des années, ces histoires ont toutes réussi à éveiller ma curiosité pour ensuite m’entraîner dans leur sillage.
Ainsi, comme c’est souvent le cas pour ce genre de recueils, bien que le niveau d’appréciation du contenu puisse différer d’un récit à l’autre (et d’un lecteur à l’autre), il n’en demeure pas moins que sculptés, ficelés et fignolés avec un souci de précision et d’esthétisme qui s’accorde remarquablement bien avec cette prose à la fois légère, fluide, empreinte de poésie, ils exhibent tous un équilibre… exemplaire.
D’intérêt variable donc, mais quasiment irréprochables dans la forme, ces contes m’ont fait penser à ces petits gâteaux qui parfois accompagnent le thé et grâce auxquels une pause sommes toutes anodine se transforme alors en un moment de convivialité.
Notes :
1.La version originale du recueil compte un septième récit ayant pour titre ‘Retrato de Mónica’.
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Histoires de la terre et de la mer
Titre original : Historias da terra e do mar (Salamandra, 1984)
Traduit du portugais au français par Alice Caffarel et Claire Cayron
Editions la Différence (1990)
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Dans la foulée des ‘Contes exemplaires’, j’ai eu envie de poursuivre ma découverte de l’écriture de cette auteure aux multiples facettes. Publié une vingtaine d’années après les ‘Contes’ , à un moment donc où la plume de S. de Mello est sans doute plus affirmée, ‘Histoires de la terre et de la mer’, réunit cinq récits, cinq textes dont le genre reste difficile à déterminer, qui sont conçus autour ou ont un lien contextuel avec la terre et/ou la mer.
‘Le silence’ décrit comment une femme seule dont l’existence et l’intérieur sont soigneusement ordonnés, voit son univers percé puis bousculé par des cris déchirants provenant de la rue.
‘Histoire de Cendrillon’ raconte la vie d’une Cendrillon des temps modernes qui, bien des années après avoir choisi entre deux voies celle qu’elle souhaitait suivre, doit payer en retour le prix qui était rattaché à ce choix.
‘La maison marine’ décrit (magnifiquement) une maison nichée entre terre et mer, parmi les dunes, que seuls le vent et les parfums traînant dans son sillage semblent habiter.
‘Saga’, un récit qui dit-t-on, évoque l’arrivée au Portugal d’un des ancêtres de l’auteure, raconte avec moult images évocatrices, l’histoire d’un jeune danois passionné, lié et viscéralement attaché à la mer qui, entraîné par son destin, voit sa route peu à peu dévier du cours qu’il aurait voulu qu’elle suive.
‘Vila d’Arcos’ décrit un village que, par petites touches, l’on devine sur le point d’être abandonné.
Simples dans la forme de même qu’au niveau de l’intrigue, ces récits mettent admirablement bien en valeur l’écriture délicatement sensuelle et toute en poésie de Sophia de Mello, une écriture au gré de laquelle l’âme des choses semble être dévoilée au grand jour, tandis qu’en catimini, se glissent quelques réflexions sur des thèmes tels que le vide, l’absence ou le destin. Voilà donc des récits où l’écriture domine, constituant ainsi cinq petites friandises s’adressant plus particulièrement aux amateurs de belle prose.
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