William Shakespeare

Intimidant, c’est bien le premier mot qui me vient à l’esprit en évoquant William Shakespeare.  Intimidant certes, mais inaccessible? Certainement pas.  Trêve de réserves, j’admettrai avoir mis bien du temps avant de partir à la découverte de cet auteur et cela d’autant plus qu’une fois mes appréhensions surmontées, le chemin menant à sa rencontre fut tout de même parsemé de quelques aventures.

Ma première confrontation avec Shakespeare eut lieu dans une toute petite salle sise au-dessus du pub du quartier londonien où je venais depuis peu d’emménager.  Une troupe locale y jouait ‘King Lear’ (Le Roi Lear).  Bien qu’ayant conscience des difficultés que pourraient me poser la langue, m’estimant en mesure d’affronter ‘la bête’, je décidai tout-de-même d’assister à la représentation.  Mais le moment venu, c’est avec un désarroi amusé que je me vis, assise au premier rang d’une salle comble, assister à un spectacle dont je ne parvenais qu’à deviner sans vraiment en comprendre le contenu.  Bref, force me fut de constater que la langue de Shakespeare m’était incompréhensible.

Suite à cette première expérience, loin de déclarer forfait, j’estimai qu’en raison des petites difficultés rencontrées par mon oreille non initiée, il valait mieux m’en remettre à mes yeux; je me tournai donc vers la chose écrite.  Mais lorsque quelque temps plus tard je me retrouvai dans l’une des grandes librairies de la capitale Anglaise, face à un mur entièrement couvert de rayons chargés à bloc d’ouvrages signés par le grand dramaturge, désemparée, ne sachant comment choisir ni à qui confier mon malaise, je me résignai, reportant mon acquisition à une date ultérieure.

Il fallut encore quelques années avant que je ne brave à nouveau mes appréhensions pour finalement me plonger dans la lecture d’Hamlet. J’ignorais alors que celle-ci allait éventuellement constituer une étape et qu’à une époque ultérieure, j’allais vivre une grande aventure, à savoir la lecture de l’œuvre complète de monsieur Shakespeare (commenté plus bas sur cette page). Mais revenons à Hamlet, puisque c’est de cette pièce dont il sera d’abord ici question.

 

 

The Tragedy of Hamlet, Prince of Denmark1

OUP (2008)

Craignant la répétition d’un scénario connu d’une part et d’autre part suivant ce que l’on recommande généralement, j’aurai donc effectué une nouvelle tentative en me tournant cette fois vers cette autre pièce qui, avec ‘Le Roi Lear’, est considéré parmi les plus accessibles du répertoire.

Brièvement, cette histoire, en sa version shakespearienne2, a pour décor principal l’actuel château de Kronborg (Elseneur, Danemark) et se déroule à une époque que l’on ne peut que vaguement situer aux environs du XVe siècle. Elle conte comment le jeune Hamlet, appelé à venger la mort de son père (roi du Danemark), doit affronter seul (et non sans émoi) une situation pour le moins complexe.

Si l’on s’en tient au scénario de base, il s’agit donc d’une histoire où le héros, un jeune homme perspicace et intelligent, plongé dans une situation antagoniste, se retrouve seul de son point de vue, confronté au monde et à la réalité qui l’entoure. Outre la sympathie que l’on éprouve pour Hamlet, l’universalité de ce scénario ajoutant aux thèmes qu’il permet d’aborder, constituent autant d’éléments propres à toucher le lecteur contemporain. Il y est question de religion, de vengeance, de justice, de conscience, de mariage, d’amitié, de filialité, de trahison, d’amour, et bien sûr, de bien et de mal. Loin d’en atténuer l’impact, l’antique contexte ayant avec la pièce traversé les siècles sans encombre, renforce l’impression de vérité universelle que suscitent les divers messages véhiculés.

Bref, il y aurait beaucoup à dire au sujet et autour de cette œuvre, mais d’autres en ont déjà longuement disserté et bien mieux que je ne saurais le faire. Suffira de dire qu’en tant que lecteur lambda mon expérience fut concluante: moyennant une brève initiation et une lecture attentive, Hamlet se laisse apprivoiser et apprécier sans trop de difficulté.

Qui plus est, cette langue aussi difficile d’accès qu’elle ait pu me paraître, ne fut pas impossible à côtoyer et une fois apprivoisée, elle s’est avéré constituer un véritable coffre aux trésors. Que ce soit par l’écriture (en vers et en prose), par les tournures de phrase, les mots inventés et réinventés, les allusions, les double et triple sens, les métaphores et autres figures, cette langue/écriture si complexe fut-t-elle aura finit par dévoiler aux yeux de la novice que je suis, l’incroyable ingéniosité de son auteur. Rien que pour cela le jeu en valait la chandelle!

Notes:

1.Titre de l’édition française: La Tragique Histoire d’Hamlet, prince du Danemark.

2.Shakespeare se serait inspiré d’une légende ancienne, rapportée entre autres par Saxo Grammaticus dans la Geste des Danois (XIIIe siècle).

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The Complete Works of William Shakespeare

Quarto Publishing, 2014

Ma lecture d’Hamlet datait déjà de quelques années lorsque que par un beau matin d’avril 2021 j’ai ouvert cette imposante compilation des œuvres de celui que l’on considère souvent comme étant le plus grand auteur de langue anglaise de tous les temps. Ayant à ce moment-là l’intention de ne lire qu’une pièce ou deux, je n’avais certainement pas prévu ni même planifié que l’univers Shakespearien allait si bien m’absorber qu’il finirait par accompagner mes petit déjeuner pendant plus de trois années.

Il n’en demeure pas moins que, d’une pièce à l’autre, d’un poème à l’autre, toujours aussi intimidée à la perspective de ce qui m’attendait, c’est non sans hésitation que j’ai abordé chaque nouvelle tranche de l’oeuvre. Mes craintes étant souvent justifiées par un manque d’information et l’édition dont je disposais n’offrant aucun support de lecture, histoire de ne rien perdre, j’ai peu à peu adopté un petit rituel de préparation, sorte de préambule visant à documenter chaque nouvelle lecture. Ainsi ai-je fait bon usage de diverses ressources disponibles en ligne y puisant les informations dont j’avais grand besoin. Je dois reconnaître que ce petit travail préparatoire aura exigé quelques efforts de ma part, mais en retour il fut invariablement couronné par une meilleure appréciation des œuvres lues.

Bref, une fois la dernière page tournée, revenant sur mon point de départ, étonnée par le long chemin parcouru depuis mon point de départ, je ne peux que me réjouir de la perspective que cette expérience m’aura permis d’acquérir au sujet de l’œuvre de William Shakespeare.

 

 

 

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